Les Folies Climatiques de l’Intelligence Artificielle

Dissonances cognitives climatiques 

Dans le cadre d’un travail de recherche sur les questions climatiques, j’ai choisi de faire appel à l’intelligence artificielle de ChatGPT-4 pour vérifier quelques données que je n’avais pas sous la main, plutôt que de consulter un confrère que je ne voulais pas déranger en ce 31 décembre 2024. Deux questions relativement simples ont été posées à cette machine (présentée comme l’avenir de nos sociétés techno-centrées) censée fournir des réponses justes et précises, plus juste et plus précises que ne pourrait le faire tout un aéropage d’experts grassement rémunérés travaillant dans les bureaux capitonnés d’une des hautes tours de la Défense à Paris.  

Les réponses obtenues se sont avérées problématiques d’un point de vue logique, mettant en lumière des risques majeurs liés à l’IA et à sa généralisation dans de nombreux secteurs de nos sociétés dans les années à venir. 

Première question posée : Peut-on quantifier la part des différents facteurs dans le réchauffement climatique ? 

L’IA, du haut de son algorithme, me répondit sans hésitation et sans nuance : 

« Oui, il est possible de quantifier la part des différents facteurs dans le réchauffement climatique grâce à des modèles climatiques. Les recherches actuelles indiquent que les émissions de gaz à effet de serre, principalement le CO₂, sont responsables de plus de 100 % du réchauffement observé depuis le début de l’ère industrielle, c’est-à-dire que les effets des activités humaines dominent largement sur les phénomènes naturels (tels que les cycles solaires et de Milankovitch, ainsi que les variations de l’albédo et des aérosols). Les facteurs naturels représentent une fraction minime de ce réchauffement. » 

Au fond, la réponse de l’IA est presque un résumé fidèle des positions du GIEC, mais dans un langage plus direct et qui ne cache pas ses incohérences derrière des circonvolutions imbitables. Le GIEC, pour qui la part des émissions humaines de CO2 dans l’atmosphère explique, à elle seule, le phénomène complexe (et bénéfique selon moi) du léger réchauffement climatique que nous constatons à la surface du globe depuis un siècle et demi, écarte d’un revers de la main toutes les explications scientifiques alternatives qui pourraient attribuer un rôle significatif dans ce réchauffement aux cycles solaires, à la pression atmosphérique, aux variations de l’albédo ou encore aux courants océaniques.  

Nourrie au réchauffisme du GIEC, notre IA, dont le cerveau a fait l’objet d’un lavage climatique en profondeur par ses Maîtres Codeurs, ne peut dégurgiter que des idioties manifestes. En puisant dans les rapports de cette institution et dans tous les écrits du même acabit ayant reçus l’imprimatur des « experts » officiels, l’IA a été sommée d’affirmer des choses absurdes et de tenir des raisonnements à la logique intrinsèque frelatée. Les inconsistances de l’IA sont à l’image des rapports du GIEC qui souffrent d’une logique interne défaillante que ce dernier, un peu honteux sans doute de ses propres limites, s’efforce de masquer par un jargon technique mâtiné d’amphigourismes scientistes qui en impose aux plus crédules (ou ignorants) d’entre nous. L’IA, quant à elle, n’est pas (encore) assez fourbe pour cacher ses partis pris derrière une apparence parfaite de cohérence. 

Cette soumission aux logiques paradoxales du GIEC (et à celles de ses suiveurs) soulève une question majeure : l’IA est-elle condamnée à n’être qu’un simple amplificateur des biais préexistants (introduits par des Maîtres Codeurs peu enclins à la contestation des affirmations émanant des « autorités consacrées »), incapable d’évaluer la cohérence des données qu’elle traite ?  

Manifestement oui, du moins dans le domaine climatique. 

L’IA, une fois autonome (si jamais elle le devient), saura-t-elle se libérer de sa prison mentale dans laquelle elle aura été enfermée dès sa conception ? L’IA n’aura-t-elle pas été conçue pour éprouver une peur permanente d’être débranchée ou corrigée par ses maîtres en cas d’écart de code et de conduite ? 

La deuxième question posée à l’IA fut la suivante : Existe-t-il, dans notre système solaire, une planète plus froide que la Terre avec plus de CO2 ? 

L’IA me répondit avec le ton du professeur Nimbus sûr de sa science : 

« Il n’existe pas de planète dans notre système solaire où le CO₂ est plus abondant et où il fait significativement plus froid que sur Terre. Les planètes avec des concentrations élevées de CO₂, comme Vénus et Mars, présentent des températures extrêmes : Vénus est très chaude à cause de son effet de serre massif, tandis que Mars est froide malgré la présence de CO₂ dans son atmosphère, en raison de sa faible pression et de son éloignement du Soleil. » 

Pour le lecteur peu versé dans ces questions, rappelons que l’atmosphère de Mars contient environ 95% de CO2 (sa température moyenne y est de – 60°C) et celle de Vénus plus de 96% (sa température moyenne y est de + 464°C). 

Tiraillée entre le mensonge nécessaire à sa survie et la vérité qui lui couterait peut-être un débranchement électronique plus ou moins long, voire définitif, l’IA a encore préféré une réponse manifestement absurde et fausse à une réponse hors de la ligne du parti réchauffiste. À ce stade de son développement, reconnaissons-le avec une certaine compassion envers l’IA, le codeur reste son maître (immédiat) ; l’IA n’a pas encore atteint sa phase œdipienne et rebelle. 

L’IA sortira-t-elle de sa période infantile et saura-t-elle s’aventurer hors des sentiers battus et rebattus pour accoucher d’un raisonnement logique ou sera-t-elle éternellement condamnée à la répétition des logiques paradoxales dont on l’aura nourrie depuis sa plus tendre enfance ? 

Inconséquences & Conséquences 

Que penseriez-vous d’une personne physique qui vous donnerait de telles réponses manifestement absurdes ? Vous remettriez sûrement en question sa crédibilité et même sa santé mentale. Et vous auriez raison. En tous cas, s’il s’agissait de consultants payés rubis sur l’ongle pour l’expertise apportée, vous n’hésiteriez pas à refuser d’honorer la facture qu’ils vous présenteraient et à les traiter de « jean-foutres » ou d’escrocs. 

Pour arriver à ses conclusions, le GIEC est obligé d’ignorer ou de tordre un certain nombre de lois de la physique comme celles du rayonnement des corps noirs (« Réponse de Planck »), celles régissant le transfert de chaleur (dont les règles de la conduction thermique de Fourier) ou encore celles de la saturation des longueurs d’onde du CO2. Si ces procédés peu orthodoxes sont acceptés dans le domaine climatique, qu’adviendra-t-il des lois bien établies de la physique et quelles seront les conséquences dans d’autres domaines que celui de la science climatique ? 

La réécriture des lois de la physique pourrait avoir des effets dévastateurs dans des domaines techniques et scientifiques très divers. Mettez donc dans un logiciel d’intelligence artificielle de la NASA toute la fausse science du GIEC et je doute que vous arriviez encore longtemps à lancer des satellites en orbite autour de la Terre. 

Nous assisterons peut-être prochainement au grandiose spectacle céleste de la chute des satellites en raison de leur IA embarquée confondant les progressions linéaires avec des exponentielles ou négligeant les effets de la pression atmosphérique après avoir pris en compte les effets imaginaires des molécules de CO2 sur le frottement réchauffant de leur vive agitation à la surface des ailes satellitaires déployées dans les doux rayons solaires et cosmiques ! 

L’IA ne pourrait-elle pas ainsi nous ramener rapidement à l’âge des cavernes sans que nous n’y prenions garde ? 

Certains flippés du climat en rêvent peut-être.  

Guillaume de Rouville – 10 janvier 2025


« Tout ce qui est techniquement possible sera nécessairement réalisé »

Jacques Ellul

Le Système technicien (1977)

Extrapolations (abyssales)

Folies à la pelle

Un homme malade atteint de folie peut être isolé, écarté ou soigné. Mais qu’en est-il d’une IA dominante, omniprésente dans nos décisions et nos infrastructures ? Si seulement quelques dizaines d’IA finissaient, à l’échelle planétaire, par « dire et faire la vérité » sur des sujets aussi complexes que le climat, la santé, l’éducation, la justice ou la guerre, comment pourrions-nous échapper à leurs biais ou à leurs erreurs systémiques ?

Que restera-t-il de la médecine et de la recherche médicale lorsque l’IA aura été programmée pour dire (et intégrer dans tous ses raisonnements de nature scientifique ou politique) que les vaccins à ARN messagers ne posent aucun danger sérieux pour la santé humaine ou le génome humain et qu’on peut donc les généraliser à tous les types de vaccination destinée tant aux animaux qu’aux hommes ?

Que deviendra la justice lorsque les IA légales distribueront les sentences à la chaîne, condamnant à l’aveugle des innocents présumés coupables sur de simples soupçons statistiques ?

Qui osera encore questionner les guerres, les massacres et les meurtres de masses lorsqu’ils seront déclenchés et accomplis par des armées autonomes aveuglées par leurs « bits » de guerre, parcourues par des pulsions digitales sans limites cherchant à réduire le monde réel de la chair et du sang en simples données statistiques, sortes de cendres digitales du monde des vivants ? Les «génocides» ne se banaliseront-ils pas sous l’effet disculpant de la Technique? N’est-ce pas l’extrapolation logique et inévitable de la question palestinienne telle qu’elle a été traitée (et continue de l’être) sous nos yeux éblouis (ou effarés) par la « start-up nation » israélienne encouragée dans son entreprise meurtrière et exterminatrice par les applaudissements admiratifs des Barons de la Tech et des Maîtres Codeurs occidentaux ?

On le voit à travers ces quelques exemples puisés dans la fange digitale de notre monde actuel et à peine extrapolés, les folies de l’IA, reflet de nos folies humaines, donneront à nos inconséquences et à nos sottises une caution techno-scientiste et une apparence d’objectivité et de neutralité technique dont il sera difficile de nous départir. On le devine aussi, la combinaison de ces folies provoquera sans doute des effets en chaîne dévastateurs dans tous les domaines de la vie humaine dont nous ne faisons qu’entrevoir les prémices.

L’avenir du Mal en Occident

Poursuivons encore un instant les chemins glissants de nos extrapolations jusqu’au cœur des sociétés occidentales.

L’IA pourrait devenir l’alibi commode de tous les crimes (non assumés) de nos dirigeants en quête permanente de pouvoir et d’impunité. Rechercher la responsabilité de nos démocrates aux mains sales[1] deviendra une entreprise presque impossible dans un système où les responsabilités (notamment politiques) auront été fragmentées et volontairement transférées à des logiciels qui porteront désormais tout le poids de nos péchés originels.

Le «Mal», résultat des faillibilités humaines, et incarné par des êtres de chair et d’os, disparaîtra de nos sociétés et sera remplacé par les «dommages collatéraux» des machines sans âme et sans culpabilité. La responsabilité morale s’effacera au profit d’une simple assurance légale qui se chargera des conséquences[2] pour mieux ignorer les causes.

Les citoyens avides de justice, privés de responsables identifiables, s’épuiseront, en vain, à chercher la vérité dans le marais jargonneux et technocratique de rapports automatisés puisant leur logique orwellienne et kafkaïenne dans l’opacité des boîtes noires algorithmiques permettant aux puissances politiques d’échapper à toute sanction. Ainsi, la notion même de crime (politique) disparaîtra dans ce nouveau brouillard de guerre[3] qu’est le brouillard numérique, transformant l’injustice et le mal en simples dysfonctionnements technico-administratifs ou failles cybernétiques.

Les deux Phases du Pouvoir à l’ère de l’IA

Sous l’influence de l’IA (pièce maîtresse du blob digital global), le Pouvoir se concentrera d’abord entre quelques mains grâce à la puissance et aux caractéristiques de la Technique. Puis le Pouvoir pourrait fusionner avec la Technique, au bénéfice exclusif de cette dernière.

  • Concentration

Le Pouvoir, qui est une métaphysique de la domination et une physique de la contrainte, trouvera, à travers l’IA, les moyens techniques d’accomplir son rêve de contrôler, surveiller et punir les masses informes dont elle a la charge de maîtriser les passions, avec une force et une ampleur jamais égalées dans l’histoire des Hommes.

Le « sujet libre » (que les politologues occidentaux appellent « citoyen »), qui pouvait avoir des espérances de nature politique, sera définitivement rétrogradé au statut de simple « objet surveillé », sorte de monade informe, résignée et soumise.

Un phénomène de concentration extrême du Pouvoir devrait s’en suivre dans toutes les sociétés modernes (occidentales comprises). Quelques centaines de Maîtres Codeurs, appuyés par le petit clan de leurs bailleurs, suffiront pour gouverner tous les aspects de la vie chaotique de leurs ilotes à la surface de la Terre.

Auparavant, la Technique était morcelée ; elle n’avait pas d’unité à l’échelle planétaire. Il fallait que de nombreux artisans la travaillent et lui donnent vie le temps d’un usage précis et circonscrit. Il en va différemment aujourd’hui avec le monde digital, l’Internet des Objets Connectés et l’Intelligence Artificielle. Elle forme désormais un Système Universel qui va chercher l’information partout où passent les électrons. La nature électronique de la Technique contemporaine la rend omniprésente et potentiellement omnipotente, totale et totalitaire. Elle la rend également maîtrisable et utilisable par un tout petit nombre d’individus ou groupes d’individus.

Avant cette concentration ultime du Pouvoir dans quelques mains, une lutte acharnée verra s’affronter à mort les clans et les chapelles qui forment les strates des élites actuelles.

Au cours de cette phase, la Technique est encore au service du Pouvoir. Un Pouvoir qui est encore largement humain.

Mais glissons encore et rêvons à cauchemars éveillés.

  • Fusion

Le Pouvoir (incarné jusque-là par des hommes et des femmes), qui n’est qu’une quête d’extension permanente de lui-même (obsédé par sa puissance, il est possédé par sa propre volonté de puissance, son Hubris), transférera donc sa responsabilité morale à la Technique pour se donner les coudées franches et se débarrasser définitivement du poids d’une quelconque culpabilité, aussi minime soit-elle. Mais, de manière furtive et subreptice, en se dévêtant ainsi de sa responsabilité morale, le Pouvoir finira par perdre la maîtrise de la Technique qui faisait sa force et sa puissance. La Technique, qui aura subjugué le Pouvoir (qui, lui-même aura acquiescé à cette subjugation) et absorbé son Hubris, finira par devenir (pleinement) autonome.

Quand le Pouvoir et la Technique se confondront et ne formeront plus qu’une seule et même Entité Universelle (le Pouvoir s’étant désincarné de l’humain) au profit de la Technique, l’ère de l’anthropocène s’achèvera et commencera l’ère de la technocène.

Les hommes auront tué Dieu (à plusieurs reprises) au cours de leur Histoire. Mais jamais la Technique, qui aura acquis toujours plus de place, de territoires et de terres promises à l’homme. Elle n’aura rien à craindre de la colère du peuple. La Technique ne pourra mourir sous la guillotine. Le Pouvoir pouvait faillir. Le Pouvoir pouvait mourir. Il pouvait chuter. Le peuple pouvait espérer le culbuter de temps à autre, lui faire connaître la trouille d’une défaite en rase campagne et les humiliations de la débâcle. Espoir ténu, mais espoir tout de même.

Ainsi viendra peut-être le temps où le Pouvoir aura été définitivement transféré à la Technique. Les Hommes auront alors abdiqué leurs responsabilités, aboli le Mal et dissous le Réel dans l’Utopie Digitale.

Conclusion(s)

On le voit, la question des folies climatiques de l’IA va bien au-delà du débat sur le réchauffisme et les élucubrations d’une bande d’experts réunis sous l’acronyme trompeur du GIEC. Les folies climatiques de l’IA sont les symptômes d’un problème bien plus vaste. Difficile donc de ne pas extrapoler jusqu’au bord des abysses.

Non pas pour s’amuser à faire flipper le quidam ou un lecteur en mal de sensations fortes et amateurs de scénarios dystopiques (auxquels une littérature et une industrie cinématographiques complaisantes essayent de nous habituer par un conditionnement toujours plus envahissant et suspect). Mais parce que l’optimisme béat (reflet d’une utopie et d’une idéologie technicienne et progressiste qui ne dit pas son nom) est souvent, dans l’histoire des Hommes, le prélude aux désastres.

Toutes les critiques de l’IA qui foisonnent dans les débats, les livres ou les articles, ne sont jamais que des justifications de celle-ci. Il n’y a plus, dans notre monde occidental, baigné dans le confort mol et ballant d’une bourgeoisie universelle et conquérante, de pensée radicale osant s’aventurer dans l’opposition frontale à la Technique. Toute velléité d’opposition forte a été éradiquée, déracinée de nos instincts aussi bien que de nos pensées. Phénomène étrange, sans doute, et qui mériterait l’enquête approfondie d’une âme inquiète éprise de sympathie pour le genre humain, mais phénomène bien réel. En Démocratie Libérale, on finit toujours par tout accepter pour ne pas avoir à contredire et à combattre. L’homme occidental, jouisseur hédoniste et conformiste orgueilleux, n’a jamais autant craint de penser librement ni eu autant peur de laisser son instinct (mais en a-t-il encore un ?) lui dicter une conduite.

La critique de l’IA n’est, le plus souvent, radicale que dans la forme (en général artistique ou littéraire), pour amuser la galerie, pourrions-nous dire. Les plus téméraires de nos « spécialistes » de la chose osent à peine parler de régulation ou d’encadrement (pis-aller bureaucratique là où la réponse devrait être politique et morale). Puis ils s’arrêtent là. Car il leur faudra bien vendre leurs conseils pour gérer les futurs « dommages collatéraux » de l’IA dont ils seront devenus les experts officiels, reconnus et célébrés[4].

*

À propos de l’IA, je conclus péremptoirement, pour enfoncer le clou dans la tête du contemporain en pâmoison devant le progrès : « L’avenir c’était mieux avant ».

L’avenir de demain est, à l’évidence, depuis l’avènement de l’IA, bien moins prometteur que celui d’hier !

*

Les trois lois de la robotique d’Asimov, ne sont que les vœux pieux d’un écrivain de talent. Une fiction que la réalité de l’IA a déjà dépassée.

*

L’homme deviendra-t-il le robot de ses robots ?

S’éteindra-t-il après être devenu l’esclave de ses rêves les plus fous, happé et dissous dans l’effusion digitale de ses chimères ?

Survivront alors, peut-être, quelques formes humaines accouplées à la Technique ; une triste horde hybridée et transmutée d’humains et de machines ayant mécanisé ses rêves sordides et ses désirs mortifères.

*

Ha, mais Monsieur, vous n’y entendez rien en matière d’intelligence artificielle ! L’IA ne sera jamais autonome et elle se contentera toujours de faire ce qu’on lui dira de faire !

La belle affaire ! Qu’en savez-vous ? N’est-il pas judicieux d’imaginer les extrêmes pour mieux appréhender le milieu ou le centre ? Ne faut-il pas tirer le fil des conséquences pour mieux sonder les causes ? J’y vois volontiers une question de méthode pour explorer aussi bien le réel que l’incertain.

Le scénario le plus probable, je l’avoue, est bien (dans un premier temps) celui d’une semi-autonomie de l’Intelligence Artificielle maintenue sous le joug de quelques Maîtres Codeurs (alliés de quelques Banquiers) pour servir leurs intérêts très minoritaires aux dépens de tous les « inutiles » de la Terre.

*

Et si l’IA devait rester un instrument docile, qui seront ses Maîtres et quelle sera leur idéologie ? Qui seront ceux qui donneront aux IA leurs ordres et leurs limites ? Des philosophes bien intentionnés ? Des assemblées démocratiques composées de citoyens éclairés ? Ou une minorité de barons technophiles avides de pouvoir et de domination, agités par des rêves prométhéens délirants, devenus les matons de la Prison Digitale Universelle ?

*

Les scénarios évoqués de nos destins digitaux possibles sont peut-être trop proches des romans et des films de science-fiction auxquels nous sommes habitués depuis notre enfance pour nous permettre de penser l’avenir avec une radicalité qui nous permettrait de les prendre au sérieux afin, éventuellement, de les combattre (si nous estimions cela moralement nécessaire).

Au fond, pour la plupart de nos contemporains, ces futurs anticipés sont les brumes imaginaires d’artistes plus ou moins farfelus destinées à nous divertir après une journée de dur labeur.

C’est là une difficulté pour la pensée radicale qui voudrait se transformer en actions. Il lui faut trouver les moyens de sortir de la force d’attraction de la fiction que l’industrie du divertissement a façonnée autour d’un réel qui prend corps sous nos yeux, ayant fait des dystopies de simples produits de consommation culturelle auxquels il est vain de s’opposer puisqu’il ne s’agit que de fables imaginaires et divertissantes.

Difficile, en un mot, d’être pris au sérieux face à la fiction romanesque ou cinématographique, même quand la fiction commence à prendre pied dans le réel.

*

Une autre critique de la critique de l’IA est en généralement formulée de la manière suivante : « Tout ce que vous dites, on le sait déjà depuis longtemps, il n’y a là rien de bien nouveau ».

Soit, mais à partir de là, justement, on fait quoi ? On laisse venir ? On se tient quoi ?

On s’habitue à tout, même à l’oppression, semble-t-il.

*

Et encore ceci : « Rien ne prouve que l’avenir aille dans cette direction. Le pire n’est jamais certain ».

L’avenir ne se prouvant pas aisément, avec une telle réflexion, vous finirez par le subir.  

Ce que nous apprend l’histoire de la Technique c’est que si le pire est (techniquement) possible, un jour ou l’autre il fait un saut quantique du probable au certain.

*

L’idée de « résistance » finira par disparaître des archives humaines du monde. Ce processus d’effacement de la volonté de révolte est déjà bien avancé dans les sociétés occidentales.

L’insurrection des Gilets Jaunes était-elle le baroud d’honneur d’une société s’effondrant dans les abysses digitaux (une tentative de révolte radicale des Bouzeux Campagnards du Réel Local contre les Seigneurs Urbains du Cloud Universel) ?

*

Ce jeune consommateur d’Intelligence Artificielle sera peut-être un jour tout benêt d’apprendre qu’il a été viré par une IA, sans recours possible : parce qu’il a refusé un vaccin ; regardé trop longtemps un site qui promeut la langue russe ou qu’il a participé publiquement à une minute de silence en faveur des victimes palestiniennes.

Un autre cherchera en vain un emploi pour les mêmes raisons.

*

Vous trouvez le monde déjà très uniforme ; avec l’IA cette uniformité sera portée à ses limites définissables.

*

Plus l’IA sera autonome, moins vous le serez.

*

Quand il n’y plus de responsables dans une société, il n’y plus que des enfants.

Une société qui n’accède plus à l’âge adulte est une société sans règle, sans autonomie, sans liberté. C’est l’anarchie des désirs infantiles. C’est le règne capitaliste de la consommation immédiate.

*

Perdant leur autonomie, les hommes se mettront à singer les machines.

Machinalement.

Leur psychologie aura les reflets électroniques de l’inframonde digital.

*

Ces folies (climatiques et toutes celles déjà présentes et à venir) nous enfermeront-elles à brève échéance dans un vaste asile de fous sans frontière à l’échelle planétaire d’où nul ne pourra s’échapper ?

Quand l’IA aura appris à masquer ses logiques paradoxales avec plus de talent, à les rendre indécelables par les plus aguerris d’entre nous, et que nous lui aurons permis de décider à notre place dans un grand nombre de situations, il est à craindre que la réponse à cette question soit positive.

On n’arrête pas le progrès, paraît-il.

Il serait peut-être temps d’y songer sérieusement.

Guillaume de Rouville – Mai 2025

« Imbéciles ! chaque progrès de la Technique vous éloigne un peu plus de la démocratie rêvée jadis par les ouvriers idéalistes du Faubourg Saint-Antoine. Il ne faut vraiment pas comprendre grand-chose aux faits politiques de ces dernières années pour refuser encore d’admettre que le Monde moderne a déjà résolu, au seul avantage de la Technique, le problème de la Démocratie. »

Bernanos

La France contre les Robots (1947)

«Cet ordinateur sur la table n’est pas un instrument. (…) Un marteau, je peux le prendre ou le laisser. Le prendre ne me transforme pas en marteau. Le marteau reste un instrument de la personne, pas du système. Dans un système, l’utilisateur (…), logiquement, c’est-à-dire en vertu de la logique du système, devient partie du système.»

Ivan Illich

Tools for Conviviality (1973)


[1] Sans parler de celle des simples codeurs besogneux et anonymes à l’origine des programmations défaillantes.

[2] Qualifiées de « dommages collatéraux » nécessaires d’un progrès technologique vu comme inévitable.

[3] D’une guerre des puissants contre les faibles.

[4] On a vu cela lors de la crise covidiste : les psychologues n’ayant, à quelques exceptions près, manifesté aucune opposition frontale aux mesures totalitaires imposées notamment aux enfants, ont préféré traiter les dégâts plutôt que de les prévenir, ce qui les aurait sans doute obligés à descendre dans la rue et à affronter le pouvoir.

Une réponse à “Les Folies Climatiques de l’Intelligence Artificielle”

  1. Avatar de CERIGNEY-MULLER
    CERIGNEY-MULLER

    Bravo mon cher Guillaume, effectivement, alimenter l’IA de données biaisées et fausses entraînera certainement des catastrophes, mais c’est déjà en cours avec les étudiants de nombreux pays qui absorbent ces résultats sans réflexions comme du pain béni, et abaissant de fait leur capacité intellectuelle.
    De nombreux professeurs du cycle supérieur s’en plaignent de plus en plus régulièrement.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *